Le 2 Juin 2016 au CERCLE " EVANGILE ET LIBERTE "
Le 2 Juin 2016 au CERCLE " EVANGILE ET LIBERTE " à Nimes .
Suite à l'échange introduit par la lecture des articles ( E & L n°229 -Mai 2016 ) de H. Pernot : "Une Eglise de multitude " et de Jean-Marie Bourqueney : "La déclaration de foi-une exhortation non dogmatique "
notre ami Paul souhaitait prolonger notre réflèxion
" J'ai retenu une phrase de H. Pernot : " Jésus ne s'est pas beaucoup préoccupé de l'expression de la nouvelle foi : " quiconque fait la volonté de mon père , celui-là est mon frère' - Mt 12.46 - Voilà ce qui nous rassemble... non pas croire mais faire"
1 - L' appel à faire est , me semble -il, à la fois ce que j'entends et ce qui m'attire dans ma compréhension de l'authenticité du témoignage de Jésus " Ce ne sont pas ceux qui disent..." mais ceux qui entrent dans des pratriques porteuses de vie qui participent du " champ de forces" - expresssion de Cobb- dans lequel Jésus se mouvait ( Sermon sur la monragne Magnificat- etc ...) prolongement des prophétes qui ne laissaient planer aucun doute sur la nature de ce qui " plait à Dieu" ( Isaié 58,6-8 ; Amos 8,6 ) Comme le dit Jesus Asurmandi : " ...inséré dans l'actualité de son époque le prophéte est selon la métaphore d'Ezéchiel, un guetteur (33,7) au sein du peuple, face aux dysfonctionnements et aux injustices , il ne se contente pas de critiquer le présent, il ouvre des perspectives, un horizon."
Je ne voudrais pas qu'un tel point de départ masque le fait qu'une telle position de " guetteur réactif " est partagée par une foule de personnes écoutant et entendant les cris et les bruits de leur temps, et qui face aux dysfonctionnements et aux injustices destructrices d'humanité se jugent appelés à s'inscrire à contre-courant. Construisant elles aussi le "champ de force" évoqué , elles entrent en processus de créaction de ce monde qui n'existe pas encore ...mais qui vient.
2- C'est de l'intèrieur de ces pratiques porteuses de vie que je situerais le désir- comme ce fut sans doute l'expériene de Jésus ( qui n'est pas né omniscient) de se risquer à dire quelque chose qui nommerait,qui identifierait,qui louerait ce qui est au coeur de la démarche, ce qui fait sens , la source.. Autrement dit, ce n'est pas le propos sur Dieu qui est premier ( car que dire de sérieux sinon que c'est un dieu "absconditus", caché ou énigmatique ( je suis qui je suis..?) ,c'est l'expérience de la force créatrice de vie qui crée la possibilité d'une parole sensée et partageable comme l'ont vécu les communautés de base (brésiliennes par exemple ) Primum vivere, diende...lopqui ( parler), quand cela sera nécesaire à chacun. Jésus n'a pas développé grand chose de savant sur sa source , sinon ce qui était expérimenté par lui, ce qui à ses yeux donnait sens à sa démarche. Il a parlé à partir de ses engagements l'ont conduit à comprendre, et nommé sa source , le dieu vivant , bienveillant, communicant, présent avec empathie, aimant, rendu "représentable" par l'image anthrophormique du père, image qui parlait sûrement à ses auditeurs et disciples immergés dans les cultures patriarcales du bassin méditerranéen . Mais tout autant il a désigné une autre source, son empathie profonde, l'impossibilité pour lui de rester sourd,insensible à la souffrance côtoyée. Il me semble pour reprendre une formule d'André Gounelle, que ce sont là les deux pôles de la "structure d'exiistence" de Jésus.
3 - Petit détour !
Dès le début de l'après Jésus, les affrontements avec la vision grecque de l'homme et le platonisme, avec les autres religions orientales, l'influence du jurudisme romain, l'arrivée de "lettrés" ( les intellos !) dans les communautés, l'impensable d'une société; fut-elle réduite sans chef ou représentant d'une autorité supérieure, ont conduit progressivement à donner plus de poids à l'orthodoxie (vraie signe d'appartenance) qu'à l'orthopraxie dans l'affirmation de la foi et à s'identifier dans l'entre-soi et dans la société d'abord par des contenus religieux ( eux-nous ) exclusifs. Au fil du temps la "morale" a pris la place de la charité comme témoignage premier de la communion à l'esprit de Jésus et facteur de reconnaissance entre fidèles à son esprit. Conseillers du prince, personnages de cour utiles, les esprits religieux, les clercs ont eu à coeur de moraliser " chrétiennement les sociétés ( obéissance aux commandements de Dieu et de l'Eglise- avec des majuscules !) et de participer à la cohésion des empires et des royaumes en s'unifiant dogmatiquement..
La prolifération des dogmes ( dogmes- tantôt intuitions- fruits de la contemplation, tantôt jeux de raisonnements , tous nés dans les cultures et formulés dans des concepts dominants d'une époque pour répondre aux nécessités ressenties, dans ce temps là, mais malheureusement figées dans leur fond et leur forme avec une prétention définitive ) a bloqué pour les temps ultérieurs la possibilité de chercher ( sous peine d'hérésie et autres maladies...) de nouvelles images, de nouveaux mots pour "dire", de nouveaux concepts nécessaire necessaires pour représenter et de dire de manière intelligible et communicable la "source". La "start up" est devenue la seule authentique et monumentale administrative " du dépôt révélé" ( quelle horreur cette expression !) Et qui a déjà pu faire entendre à une administration si savante, et depuis toujours si " experte en humanité" ( Pie XII ) qu'elle n'était que relative ?
4 - Retour au point de départ
Notre " structure d'existence" ( pour reprendre l'expression d'André Gounelle) pourrait elle se construire dans le sillage de celle de Jésus ? Non comme "l'imitation" piétiste pronée par François de Salles au XVIII ° ; plutôt en se fondant de manière à la fois réaliste et utopique sur l'écoute des bruits et tourments de notre temps dans lesquels peuvent s'entendre les appels de son esprit , leur dynamisme.
"...oubliant ce qui est en arrière et tendant vers ce qui est en avant.. (Phil. 1.3 ) ; "..pèlerins et voyageurs sur terre...(Hb 11.12 )
Nous avons un horizon..non ?
Mais comme l'écrit J.B Cobb ( cité par A. Gounelle) :nous n'avons pas la prétention d'être arrivés, nous marchons sur le chemin".
Robert Bastide
J'adhère ....
J'adhère à l'analyse que nous propose Paul, qui nous permet aussi de faire le point sur " notre structure d'existence"-
Ce texte pourrait être retenu comme thème de réflexion dans le cadre des rencontres mensuelles de notre " Cercle".! qu' en pensez-vous ?
Je voudrais ébaucher ici "une structure d'existence " ....peut-être la mienne .
Une "communauté- institution" comme le protestantisme doit transmettre l'Ecriture mais non pas pour défendre "une" interprétation car le message devient une annonce qui se renoue continuellement - nous devons lire les signes des temps et pas nous laisser mystifier par la recherche d'une Vérité absolu.
J'adhére à un protestantisme qui autorise à chacun la liberté d'interprétation des Ecritures . Il n'y a d'autorisation que de s'autoriser, elle n'est pas hiérarchique, elle est mutuelle, "un espace à developper", dans un sens de construction; il ne s'agit pas seulement d'une "autorisation préalable" mais d'une démarche d'accompagnement et d'échange,avec pour objectif le vivre ensemble dans la bienveillance.
J'adhère à un Dieu étroitement solidaire d'un christianisme pratique et social dont la Cène est l'expression décisive.W. Monod , qui faisait donner un repas pour les 'démunis" du quartier des Halles , chaque fois qu'on célébrait la Cène au cours du culte de l'Oratoire , affirmait dans une prédication " le repas mystique est en même temps un repas social , le réveil religieux du protestantisme français sera lié à cette comprehension plus profonde , à la fois plus sociale et plus mystique de la Ste Cène.."
Notre monde désorienté a besoin de mouvements qui s'inscrivent dans l'indignation active contre le " désordre établi" ,ils tiennent le rôle de nos prophètes biblique....
Abraham Heschel (1907-1972), juif polonais, réfugié aux Etats-Unis a passé sa vie à "ramener Dieu dans le monde" . Il nous parlait d'un Dieu "Tout-Autre". Il écrivait :" Le prophète est la voix que Dieu a prété à l'angoisse silencieuse , une voix pour les pauvres dépouillés et pour les richesses profanées du monde..;;un point de croisement entre Dieu et l'homme...à travers les prophétes c'est Dieu qui s'indigne...
Heschel nous parle d'un Dieu amoureux de l'homme mais banni par lui, d'un Dieu habité par un manque essentiel, Dieu qui n' est pas un souverrain tout puissant mais au contraire en perpetuelle attente d'un signe, d'un geste ou d'une parole humaine. Dieu n'est pas Dieu si nous ne sommes pas ses témoins. Heschel se trouvait au côté de Martin Luther King pour les droits civiques , il s'est opposé vivement contre la guerre au Vietnam....
A. Heschel , S. Weil, M. Zundel , N. Berdiaeff; D. Bonhoeffer, E. Hellesum nous parlent tous d'un Dieu fragile entre nos mains: ne s'agit-il pas du Dieu de Jésus de Nazareth ! un Dieu Tout-Autre.
